J.O. Numéro 196 du 25 Août 2001       J.O. disponibles       Alerte par mail       Lois,décrets       codes       AdmiNet

Texte paru au JORF/LD page 13642

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Rapport au Président de la République relatif à l'ordonnance no 2001-741 du 23 août 2001 portant transposition de directives communautaires et adaptation au droit communautaire en matière de droit de la consommation


NOR : ECOX0100109P



Monsieur le Président,
La loi no 2001-1 du 3 janvier 2001 a autorisé le Gouvernement à prendre, par ordonnances, les dispositions législatives nécessaires à la transposition de directives, ainsi que les mesures requises pour la mise en oeuvre du droit communautaire.
La présente ordonnance, prise en application de cette habilitation, traite de droit de la consommation et a pour objet de transposer en droit interne sept directives du Parlement européen et du Conseil dans le domaine de la protection des consommateurs.

Chapitre Ier
La publicité comparative

Les mesures prévues au chapitre Ier de la présente ordonnance (art. 1er à 4) modifient le dispositif du code de la consommation relatif à la publicité comparative, pour tenir compte des prescriptions de la directive 97/55/CE du 6 octobre 1997 modifiant la directive 84/450/CEE du 10 septembre 1984 sur la publicité trompeuse.
La publicité comparative a été admise en France par l'article 10 de la loi du 18 janvier 1992, codifié ensuite aux articles L. 121-8 à L. 121-14 du code de la consommation.
La publicité comparative permet aux entreprises de faire connaître aux consommateurs les avantages de différents produits et services comparables et contribue à une amélioration globale de la qualité en stimulant la concurrence. Elle doit cependant rester raisonnable et loyale.
La directive européenne 97/55/CE du 6 octobre 1997 harmonise les conditions de la publicité comparative entre les Etats membres, qui connaissaient des régimes très différents. Cette disparité constituait un obstacle pour l'annonceur qui souhaitait réaliser une campagne de publicité comparative au plan européen. C'est à cet effet que la directive 84/450/CEE du 10 septembre 1984 relative à la publicité trompeuse a été modifiée afin d'y inclure un dispositif applicable à la publicité comparative.
Les nouvelles mesures, qui font l'objet d'une harmonisation totale, la clause minimale visée à l'article 7 de la directive n'étant pas applicable à la publicité comparative, n'entraînent pas de modifications fondamentales dans le dispositif national, mais des adaptations de celui-ci sont indispensables.
L'article L. 121-8 du code de la consommation est ainsi réaménagé sur quelques points. Le champ d'application de la réglementation relative à la publicité comparative est élargi. La directive considère en effet comme comparative la publicité qui permet l'identification, même implicite, d'un concurrent, ou de biens ou services offerts par un concurrent. Certains tribunaux avaient déjà reconnu à une publicité un caractère comparatif dès lors que le concurrent non cité pouvait être identifié.
Pour éviter les dérives possibles, de strictes limitations sont maintenues dans le texte nouveau. La publicité comparative ne devra pas être trompeuse et devra être réalisée de manière objective ; la ou les caractéristiques comparées devront être essentielles, pertinentes, vérifiables et représentatives.
Les conditions dans lesquelles la comparaison pourra être effectuée sont élargies. Désormais, cette comparaison sera licite pour autant qu'elle porte sur des biens ou services « répondant aux mêmes besoins ou ayant le même objectif » et non plus seulement sur des biens ou services « de même nature ». La comparaison sur le prix ne sera plus limitée aux biens ou services « identiques vendus dans les mêmes conditions ». Cette rédaction vise à éviter que ne puissent être comparés que des produits strictement identiques, ce qui aboutirait souvent à interdire toute comparaison.
Enfin, dans le cas d'une offre spéciale donnant lieu à une publicité comparative, des obligations d'informations particulières sont mises à la charge de l'annonceur (durée de l'offre, disponibilité des biens ou services, etc.).
L'article L. 121-9 du code de la consommation est complété afin de tenir compte des exigences négatives supplémentaires que prévoit la directive en matière de publicité comparative. Celle-ci ne doit pas, notamment, engendrer de confusion sur le marché entre l'annonceur et un concurrent ou entraîner le discrédit ou le dénigrement des marques.
La directive ne permet plus de maintenir les dispositions de l'article L. 121-12 du code de la consommation imposant au professionnel de communiquer, avant toute diffusion, une annonce comparative aux concurrents concernés par celle-ci. Concrètement, la suppression de cette exigence n'a pas de portée significative. En effet, la jurisprudence ne sanctionne son inobservation que lorsque les concurrents subissent un préjudice du fait de ce manquement.
En revanche, l'annonceur doit être désormais en mesure d'apporter, dans un bref délai, la preuve de l'exactitude matérielle des termes de la publicité comparative.
L'article L. 121-12 est donc modifié sur ces points.
Chapitre II
Les contrats conclus à distance

Les mesures prévues au chapitre II de la présente ordonnance (art. 5 à 15) transposent en droit interne la directive 97/7/CE du 20 mai 1997 relative aux contrats négociés à distance.
Le cadre juridique issu du droit harmonisé renforce la protection des consommateurs qui effectuent des achats de biens ou services à distance, notamment en utilisant les nouvelles technologies de la communication.
A cet effet, les dispositions figurant actuellement aux articles L. 121-16 à L. 121-20 sont modifiées et complétées.
L'article L. 121-16 définit tout d'abord, en reprenant le texte de la directive, la notion de vente à distance des biens ou des services à des consommateurs, au moyen d'une ou plusieurs techniques de communication à distance, telles que : imprimé non adressé, imprimé adressé, lettre standardisée, publication presse avec bon de commande, catalogue, téléphone avec intervention humaine, téléphone sans intervention humaine (automate d'appel, audiotexte), radio, visiophone (téléphone avec image), vidéotexte (micro-ordinateur, écran de télévision) avec clavier ou écran tactile, Internet, courrier électronique, télécopieur, télévision (téléachat, télévente), télévision interactive. Ainsi, une transaction sur Internet relève du régime de la vente à distance et les dispositions du présent chapitre ont vocation à s'appliquer aux services en ligne.
La définition du consommateur, du fournisseur et de l'opérateur de technique de communication n'est pas reprise, ces concepts étant intégrés au droit positif, à travers, notamment, la jurisprudence.
La présente ordonnance reprend strictement, à l'article L. 121-17, les exemptions prévues par l'article 3 de la directive. Cela concerne, notamment, les services financiers et les ventes aux enchères, qui se trouvent ainsi exclus du champ d'application du texte.
L'objectif de protection du consommateur se manifeste tout au long du processus contractuel.
Le fournisseur doit donner au consommateur, de manière claire et compréhensible, des informations préalables (art. L. 121-18). Les informations retenues par la présente ordonnance sont celles de la directive. L'article L. 121-18 ne reprend pas, néanmoins, les obligations générales d'information déjà prévues par le code de la consommation ou d'autres textes, telles que l'information sur les caractéristiques essentielles du bien ou du service et l'information sur le prix, qui s'appliquent à la vente à distance comme à toute vente.
Le consommateur doit recevoir par écrit ou sur un autre support durable à sa disposition, confirmation de la plupart des indications données au titre des informations préalables (art. L. 121-19). S'agissant de la preuve des informations fournies, le droit commun qui fait peser la charge de la preuve sur la personne qui est tenue légalement de l'information, s'appliquera.
Le consommateur dispose d'un délai de sept jours francs pour se rétracter sans pénalités et sans être tenu d'indiquer le motif de cette rétractation (art. L. 121-20). Un délai de retour de sept jours francs pour les produits existait déjà dans notre droit. Le domaine d'application du droit de rétractation est, cependant, plus large, puisqu'il vise non seulement les biens mais aussi les services.
Lorsque le droit de rétractation est exercé, le remboursement qui incombe au fournisseur doit être effectué dans les meilleurs délais et, au plus tard, dans les trente jours qui suivent l'exercice de ce droit (art. L. 121-20-1).
Les dérogations à l'exercice du droit de rétractation prévues par la directive ont, par ailleurs, été reprises dans la présente ordonnance (art. L. 121-20-2). Parmi celles-ci, figure la fourniture de biens ou de services dont le prix effectif à la vente, et non le coût ou le prix de revient, évolue en fonction de fluctuations des taux du marché financier.
Un délai d'exécution du contrat à distance est prévu, sauf stipulations contraires des parties, ainsi que des mesures assurant la protection du consommateur en cas de défaut d'exécution du contrat par le fournisseur (art. L. 121-20-3).
Certains contrats sont dispensés par la directive des obligations relatives à l'information préalable, à la confirmation écrite des informations, au droit de rétractation et de celles afférentes à l'exécution du contrat. Ces limites sont reprises par la présente ordonnance et se justifient car elles concernent, d'une part, la fourniture, à l'occasion de tournées fréquentes et régulières effectuées par des commerçants, de produits de consommation courante, que le consommateur connaît bien, d'autre part, des prestations liées aux voyages et aux loisirs fournies à une date ou une période précise (art. L. 121-20-4).
La directive prévoit des limites à l'utilisation de certaines techniques de communication. Ainsi, le recours à un automate d'appel et au télécopieur nécessite le consentement préalable du consommateur. Plus généralement, l'utilisation des autres techniques de communication n'est possible qu'en l'absence d'opposition manifeste du consommateur. Ces règles sont énoncées à l'article L. 121-20-5.
La fourniture de biens ou de services à un consommateur sans commande préalable est prohibée par la directive. Cette pratique est déjà sanctionnée en droit français : le code de la consommation comporte, dans ses articles L. 122-2 à L. 122-5, des dispositions interdisant la pratique de la vente sans commande préalable et l'article L. 122-2 reproduit les dispositions de l'article R. 635-2 du code pénal, qui sanctionne cette pratique de l'amende prévue pour les contraventions de 5e classe. L'article L. 122-3 du code de la consommation est néanmoins complété de façon à dispenser le consommateur victime de cette pratique de toute obligation. Il ne sera dans l'obligation ni de payer le prix, ni de faire les démarches pour restituer le bien.
Lorsque le consommateur exerce son droit de rétractation alors que le prix est couvert par un crédit affecté, le contrat de crédit est résilié sans pénalité (art. L. 311-25-1).
Des dispositions juridiques plus générales permettent de donner à l'ensemble de ce texte de transposition de la directive 97/7/CE un caractère suffisamment contraignant pour que le consommateur ne soit pas privé des mesures protectrices qui lui sont ainsi accordées, tant au plan national (art. L. 121-20-10) qu'au plan international (art. L. 121-20-6).
Chapitre III
Clauses abusives dans les contrats conclus
avec les consommateurs

Le chapitre III de la présente ordonnance comporte un article unique, l'article 16, qui a pour objet de compléter le dispositif de l'article L. 132-1 du code de la consommation relatif à la protection des consommateurs contre les clauses abusives.
A cet effet, il est précisé, au septième alinéa de cet article du code de la consommation, que si les clauses portant sur la définition de l'objet principal du contrat ou sur l'adéquation du prix ou de la rémunération au bien vendu ou au service offert échappent à l'emprise de l'appréciation de leur caractère abusif, cela ne vaut que pour autant qu'elles soient rédigées de façon claire et compréhensible.
Cette précision, conforme à la jurisprudence des tribunaux et à la doctrine de la Commission des clauses abusives, permettra aux autorités françaises d'éviter un contentieux inutile et de faible importance ayant pour cause juridique la transposition incomplète de la directive 93/13/CEE du 5 avril 1993 concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs.
Chapitre IV
Alimentation humaine et animale

Le chapitre IV de la présente ordonnance a pour objet de compléter et de renforcer le dispositif de contrôle des denrées alimentaires.
L'article 17 ajoute à cet effet au titre Ier du livre II du code de la consommation un chapitre VIII intitulé : « Prévention en matière d'alimentation humaine et animale ». La section 1 de ce chapitre (art. L. 218-1 à L. 218-5) comporte les dispositions nécessaires pour répondre aux obligations qui résultent de la directive du Conseil 89/397/CEE du 14 juin 1989 relative au contrôle officiel des denrées alimentaires et de la directive 95/53/CE du 25 octobre 1995 modifiée fixant les principes relatifs à l'organisation des contrôles officiels dans le domaine de l'alimentation animale.
Ces deux directives prescrivent que le contrôle est effectué non seulement en cas de soupçon de non-conformité mais également de façon régulière. L'article 5 de la directive 89/397/CEE précise que le contrôle consiste en une ou plusieurs opérations en fonction de la recherche envisagée, notamment l'inspection, le prélèvement d'échantillons et leur analyse, ainsi que l'examen des systèmes de vérification éventuellement mis en place par l'entreprise et des résultats qui en découlent. Cet article doit notamment se lire à la lumière du quinzième considérant, qui mentionne expressément le fait que « les contrôles officiels doivent contribuer à prévenir les infractions à la législation relatives aux denrées alimentaires ».
C'est pourquoi il est créé un article L. 218-2 ayant pour objet de permettre aux agents de prélever des échantillons en dehors du cadre de la recherche d'une infraction, par exemple dans le cadre des plans de surveillance. Ainsi, en 1997, le programme de contrôle coordonné européen a notamment porté sur la contamination en aflatoxine B1, B2, G1, G2 des épices, alors qu'aucune limite maximale de contamination n'a été fixée pour ces produits.
L'article 10 de la directive 89/397/CEE dispose que lorsque les agents de contrôle relèvent ou soupçonnent une irrégularité, ils prennent les mesures nécessaires. L'article 11 de la directive 95/53/CE prévoit que lorsqu'il existe une suspicion de non-respect des exigences communautaires, l'autorité compétente procède aux contrôles nécessaires et, dans le cas où cette suspicion est confirmée, elle prend les mesures appropriées. Les articles L. 218-3 et L. 218-4, introduits à cet effet, reprennent les dispositions figurant dans la loi d'orientation agricole (art. L. 233-1 et L. 232-2 du code rural) qui s'appliquent aux seuls produits d'origine animale.
Afin d'assurer une réelle sécurité pour les consommateurs, il est nécessaire de reconnaître à tous les agents agissant dans le domaine alimentaire des pouvoirs de police administrative, et ce quelle que soit la nature des denrées en cause. Ces pouvoirs doivent s'exercer au lieu même de production et permettre aux agents d'ordonner des mesures correctives lorsqu'un manquement à la réglementation crée un risque pour la santé publique. Dans le même sens, la présente ordonnance prévoit la possibilité de rappel des lots de produits qui présentent ou sont susceptibles de présenter un danger pour la santé publique (art. L. 218-4).
L'article 13 de la directive 95/53/CE prévoit que si, lors d'un contrôle effectué au lieu de destination de l'envoi ou en cours de transport, est constatée la non-conformité des produits avec les dispositions relatives à la réglementation en matière d'alimentation animale, l'Etat doit prendre les dispositions appropriées et mettre en demeure le destinataire, ou toute autre personne, ayant droit d'effectuer l'une des opérations suivantes : la mise en conformité des produits dans un délai à fixer, la décontamination éventuelle, tout autre traitement approprié, l'utilisation à d'autres fins, la réexpédition dans le pays d'origine, voire la destruction des produits. Ces mesures sont reprises à l'article L. 218-5.
Les sections 2 et 3 du chapitre VIII sont relatives aux établissements traitant des produits par ionisation.
Le nouvel article L. 218-6 transpose l'article 7 de la directive 1999/2/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 février 1999 relative au rapprochement des législations des Etats membres sur les denrées et ingrédients alimentaires traités par ionisation. Cet article prévoit que toute unité d'irradiation doit faire l'objet d'un agrément. Celui-ci sera délivré par le préfet si l'établissement satisfait à des conditions définies par arrêté interministériel.
L'article L. 218-7 a pour objet de sanctionner le traitement par ionisation des denrées par un établissement qui n'est pas titulaire d'un agrément et de permettre l'obtention de l'application pleine et efficace des mesures ordonnées en application des articles L. 218-3 à L. 218-5 du code de la consommation en prévoyant une sanction pénale dans le cas où elles ne seraient pas respectées.
L'article 18 transpose l'article 11 de la directive 95/53/CE en introduisant dans le code rural un article L. 235-2 qui donne des pouvoirs de police administrative aux agents des services vétérinaires afin d'intervenir lorsqu'un établissement préparant des aliments pour animaux présente une menace pour la santé publique.
Chapitre V
Action en cessation

Les articles 19 et 20 de la présente ordonnance assurent la transposition de la directive 98/27/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 mai 1998 relative aux actions en cessation en matière de protection des intérêts des consommateurs.
Cette directive a pour objet de rapprocher, dans une certaine mesure, les dispositions nationales permettant de faire cesser les pratiques illicites qui enfreignent les droits nationaux harmonisés dans le domaine de la protection des intérêts économiques des consommateurs.
A ce titre, il est rappelé que le législateur européen impose de prévoir une action en justice et d'assurer la reconnaissance mutuelle du droit d'exercer une telle action au profit des organismes qui sont, selon les critères nationaux, en charge de la défense des intérêts collectifs des consommateurs. Ainsi, les organismes inscrits sur une liste publiée au Journal officiel des Communautés européennes pourront justifier de leur qualité pour demander la cessation ou l'interdiction de la pratique illicite à la juridiction ou à l'autorité administrative compétente du pays dans lequel le manquement au droit harmonisé trouve son origine.
La directive précise dans un document annexe le champ du droit communautaire dans lequel cette action pourra être exercée. Il s'agit de dix directives communautaires : publicité trompeuse, démarchage, crédit, télévision, voyages à forfait, publicité des médicaments à usage humain, clauses abusives, propriété à jouissance en temps partagé, contrats à distance et garantie des biens de consommation. La directive prévoit que ce champ pourrait être élargi tous les trois ans après rapport de la Commission au Conseil.
Pour satisfaire aux exigences de cette directive, l'ordonnance modifie l'article L. 421-6 du code de la consommation de façon à reconnaître le droit d'agir devant la juridiction civile à ces organismes ainsi qu'aux associations de consommateurs mentionnées à l'article L. 421-1 du code de la consommation. Cela permettra désormais à ces dernières de saisir à titre principal le juge civil pour demander, à l'instar des droits reconnus aux organismes qualifiés, la cessation des pratiques illicites.
Enfin, l'article 21 traite de l'exécution de la présente ordonnance.
Tel est l'objet de la présente ordonnance que nous avons l'honneur de soumettre à votre approbation.
Veuillez agréer, Monsieur le Président, l'assurance de notre profond respect.